Sara Do en TerraGalice

Je, vous parle d'un temps...


Je, vous parle d'un temps...


(Micro nouvelle)

 

 

 

 


Vent de solitude

Empire de verre

Ma canne bancale

Mon aimant si passion

Jette un coup d'oeil

En toile de fond

Blesse le bas

À l'un, pudeur...

 


T'es partie. C'est entendu à l'oreille collée de la peur. Les sables mouvants ont englouti  les restes de sentiments humains. L'inavouable s'est jeté tête baissée dans la fosse de l’oubli.



S'il te plaît laisse la mort m'envahir comme un troubadour. C'est promis, plus jamais je ne toucherai le sentiment d'amour. Plus jamais je ne toucherai du bout des doigts un seul corps. Plus jamais. Je m'attacherai au pieds du banc cale pour ne pas oublier l'heure fatale.

 

Il a tué toutes mes croyances, toutes mes certitudes, même Dieu n'y peut rien. Il fait la gueule Dieu ? Tant mieux ! Moi aussi, je lui fais la gueule. J'ai pris le parti du Diable avec un "D » majuscule, pour être sûr de sa gravure en mon âme et conscience.

 

Bella. J'aurais pu m'appeler Laida. Pas de bol, ce sera Bella. La fée de la beauté m'a légué une partition de rêve. Je n'ai pas l'intelligence, mais la vertu d'une éducation rigide à la bonne école. 1937 n'est pas un bon cru, c'est l'heure des connivences. Pétain n'est pas loin.


Mes parents sont sens dessus dessous, je ne suis pas la bienvenue. La numéro trois après le numéro deux, Farid fils prodigue... et, la numéro un, Aïcha fille divine.

 

Le grandissement. Au fil des années, je deviens une beauté à toute épreuve et l'adolescence sévit au pensionnat tenu par des religieuses irréprochables.


J'apprends la couture.  C’est très important la couture et puis ça peut toujours servir. Si tu sais passer un fil dans le chat d'une aiguille, tu arriveras toujours à faire quelque chose de ta vie. Il en est ainsi depuis la nuit des temps.


Ma fille, on va te marier. Tu es en âge. Je suis heureuse. J'ai à peine 18 ans, je sors du pensionnat et j'ai la vie devant moi. Sourire. Il est beau, autant que je suis belle. Il a dix ans de plus que moi. Il est militaire de carrière. Il porte de jolies médailles éclatantes au soleil. Bientôt je les ferai briller comme des pépites d'or. Je sais comment faire, j'ai bien appris ma leçon. Cracher délicatement et frotter énergiquement avec le chiffon. C'est Mamé qui le dit !


Bientôt je ferai partie des femmes respectables. Je suis fière. Mon futur en impose dans son bel uniforme. Il va faire carrière et moi je le suivrai au bout du monde, en terre étrangère. C'est Papé qui le dit !


Le bout du monde. Au bout de neuf mois, j'accouche des jumeaux. Quinze mois après, j'accouche d'une fille. J'ai vingt ans à peine et je suis au bord de ma vie.



Trois mouflets en bas âges, je sais à peine cuisiner. Je mets les pâtes dans la poêle sans eau, j'épluche les pommes de terre en prenant plus de chair que de peau. Mais, je suis femme au foyer hautement certifiée. Mon mari n'est pas très content, il  pense qu'il s'est fait pigeonner d'une oie blanche.

 

Moi, j'aimerais bien aller danser au bal du samedi soir. Je l'entends de ma fenêtre ouverte, le son de l'accordéon, le frisson des cymbales, la grosse caisse qui martèle le rythme cadencé et quand je penche la tête j'aperçois les lampions. Mon mari est aux Îles. Je ne peux pas sortir ce n'est pas convenable.


Et si le convenable allait se coucher ? Les petits dorment tranquillement, j'entends leur respiration. Une danse, juste une danse... Personne n'en saura rien. Après tout, les Îles, c'est loin !



Comme si de rien n'était 

Le vent souffle en corps

La mer vague dehors

L'attente veille au corps

L'hivers neige dehors...

 

Et si les cancans n'en savaient rien pour une fois ? Diablesse que voilà !

 


Sara Do   

 


(suite et correction bientôt... heu... peut'être)



08/12/2010
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