Grâce et dénuement, d’ Alice Ferney
Article publié :
Grâce et dénuement
D' Alice Ferney
Editon ACTES SUD, 1997
BABEL, une collection livre de poche
Le thème de ce magasine paroissiale :
Se prendre en charge !
Se faire aider ! Aider l'autre !
Allez trouver un livre à la hauteur d'un tel sujet !
C'était sans compter sur la petite souris Sara Do qui vous propose une histoire sortant de l'ordinaire et bien en lien avec la question qui nous préoccupe.
Pour résumer, plantons le décor d'une banlieue comme il en existe tant : Un terrain vague, une décharge, des logements sociaux et une famille de gitans sédentarisée. Ajouter à cela une gadgé bibliothécaire qui débarque pleine de bons sentiments et qui en plus, veut lire des livres à des enfants qui n'en ont pas ! Vous avez déjà là, de quoi nourrir votre imaginaire collectif, sauf que l'histoire pourrait être plus vrai que vrai… Zola pourrait y retrouver ses petits tant le décor est propice à une étude sociale presque caricatural !
Parlons un peu de cette famille. Il y a Angéline, la doyenne, ses fils, ses belles-filles et ses petits-enfants. Ils vivent de presque rien, sans papiers, sans travail, sans eau courante, sans essence, à l'écart d'une société qui menace en dépit des lois de les expulser. La rencontre avec Esther ne se fait pas sans mal. Les gitans l'accueillent avec méfiance, mais comme les enfants prennent plaisir à écouter ses histoires, ils finissent par l'adopter.
Tous les mercredis, Esther vient passer un moment avec eux et après la lecture, elle prend un café avec les femmes. Malgré sa douceur et sa discrétion, elle reste en décalage. Ses bonnes intentions et sa culture s'adaptent mal au mode de vie des gitans.
Ce livre a le mérite de s'être attaqué au monde si compliqué à retranscrire avec justesse qu'est celui des gitans. Ce peuple exclu par son refus d'appartenir à la société, est gênant pour la communauté, car il est en marge tout en étant indépendant. Pourtant, une personne va s'interposer, s'inscrivant contre tout cela.
C'est Esther, bibliothécaire modèle, qui représente notre bonne conscience. Elle fait des heures supplémentaires pour le seul plaisir d'entrevoir la joie dans les yeux d'enfants manouches, la furtive étincelle de l'espoir ravivée par l'écoute de merveilleux contes.
Dans ce roman, l'auteur défend les vertus de l'alphabétisation et met en évidence les difficultés qu'ont les gitans à accéder à leurs droits. le portrait qu'elle dresse de cette petite communauté: insalubrité du camp, journées passées ensemble dehors, nuits dans les mêmes caravanes, ne sont décrites que pour illustrer les rapports entre maris et femmes, adultes et enfants. Puisque l'isolement est impossible, chacun doit dissimuler ses souffrances et ses désirs ou accepter de les partager. En même temps, cette proximité est salvatrice: «Personne est fait pour vivre seul, ça c'est sûr et nous, Gitans, on l'a mieux compris que vous autres», dit Angéline, la grand-mère.
Avec Grâce et dénuement, Alice Ferney a obtenu le prix Culture et bibliothèques pour tous.
Sara Do
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